L’émotion a été étroitement associée à la motivation dès les premières théories motivationnelles. Par exemple, pour la théorie d’Atkinson (1964) la fierté en cas de réussite et la honte en cas d’échec sont des composantes majeures concernant la recherche du succès ou l’évitement de l’échec. De très nombreuses théories motivationnelles incluent une certaine vision des émotions.

Bandura (2003) estime que l’émotion, au travers des interprétations que fait l’individu des manifestations périphériques, a un impact sur le sentiment d’efficacité personnelle.
De même, la théorie de Deci & Ryan (2000) repose sur l’intérêt en ce qui concerne la motivation intrinsèque. L’intérêt qui se dégage de la pratique d’une activité est d’ailleurs une émotion majeure dans le cadre de la motivation qui, à ce titre, fait l’objet d’une catégorie conceptuelle à elle seule (Schiefele, 1991 ; Krapp, 2005 ; Sylvia, 2001 ; Kintsch, 1980).

Avec la fin du béhaviorisme, différentes conceptions plus spécifiquement liées aux émotions sont venues enrichir celles sur la motivation à partir des années 70. En effet, la recherche dans ce domaine est riche d’une longue histoire puisque les premières approches majeures sont liées aux travaux de Darwin (1898) et de James (1884).

L’interprétation physiologique de James (1884) sur la nature des émotions se retrouve encore actuellement dans de nombreuses approches motivationnelles (par exemple Bandura, 2003) et neurologiques (Damasio, 1995).

L’approche périphérique des émotions part du principe que les manifestations physiologiques des émotions (accélération cardiaque, crispation viscérale, etc.) sont la véritable conscience de l’émotion et que cette dernière n’a pas d’existence avant ces expressions. Même si cette approche pose de sérieuses difficultés puisqu’elle ne permet pas, par exemple, de comprendre pourquoi les tétraplégiques ressentent encore d’intenses émotions (Parrot, 2004), elle a posé les bases d’une interprétation cognitive des émotions. Dans une expérience, Schacter & Singer (1962) ont montré, qu’en fonction des situations, la même activation physiologique peut être interprétée différemment. Ce résultat parmi d’autres, a jeté les bases d’une distinction entre l’excitation émotionnelle (arousal) et l’évaluation (appraissal) de celle-ci (Lazarus, 1984 ; Zajonc, 1984).

Bien qu’il existe actuellement différentes conceptions émotionnelles de la relation complexe et intriquée que peuvent entretenir cognition et émotion (Parrot, 2004), différentes théories motivationnelles ont proposé des modèles de l’impact des cognitions sur l’émergence de certaines formes émotionnelles particulièrement importantes pour comprendre la motivation. L’une des conceptualisations les plus abouties émane de la théorie « attributionnelle » des émotions de Weiner (2006). Cette théorie s’appuie sur les résultats d’expérimentations aboutissant à des réussites ou des échecs. Ces deux résultats entraînent en effet des émotions très variées en fonction des cognitions et du contexte qui en explique l’apparition (les causes plutôt que les raisons). De même, Pekrun (2006) dans son analyse des émotions d’accomplissement propose, lui aussi, un modèle permettant de comprendre la construction des émotions suite aux évaluations scolaires ainsi que leurs impacts motivationnels.

D’autres théories, plus proches des travaux de Darwin, se sont intéressées aux constantes transculturelles des émotions que recèle l’extraordinaire profusion langagière propre à chaque langue. En général, pour ces théories l’émotion se caractérise par son aspect directionnel et énergétique ce qui en fait une motivation.
Pour Tomkins (1981), si certaines émotions sont innées, celles-ci reposent sur des affects qui sont dotés d’une extraordinaire labilité leur permettant de s’associer à n’importe quelle scène de la vie courante (des scripts) et cette association unique peut être la source d’une nouvelle émotion. Sa distinction entre une émotion (qui est l’association entre un affect et un script) et un affect (liés à l’activation de certains centres corticaux comme ceux du plaisir ou de la douleur) montre bien une des difficultés redoutables que pose l’étude de l’émotion actuellement ; celle de la définition des différentes formes, état ou traits émotionnels. C’est au niveau des affects que se joue l’enjeu motivationnel de l’émotion pour Tomkins (1981). Les affects amplifient l’exigence/l’urgence de toutes les choses avec lesquels ils sont assemblés. Pour lui, l’individu se concentre davantage et passe dans ses priorités une situation qui est qualifiée affectivement.
Ces deux aspects (activation liée à la présence d’émotion et caractère inné de certaines émotions) se retrouvent également dans la théorie d’Izard (1991). Pour cet auteur, l’émotion est une expérience sensationnelle (sans limitation aux perceptions sensorielles) qui motive, organise et guide la perception, la pensée et l’action. Izard (1991) propose une liste d’émotions fondamentales qui seraient innées.

Dans une perspective purement darwinienne, Fredrickson (2001, 1998) propose, elle aussi, une liste d’émotions tout en poussant plus loin le raisonnement évolutionniste. La théorie de l’élargissement constructif des émotions positives qu’elle propose, postule que cinq émotions positives (joie, intérêt, satisfaction, fierté, amour) partagent le fait d’ouvrir momentanément le répertoire des actions et de la pensée de l’individu, et ce, de façon à construire ses ressources personnelles, que ce soit physiquement, psychologiquement ou physiologiquement. Dans cette perspective, les émotions positives acquièrent un sens du point de vue de l’évolution puisqu’elles permettent aux espèces de parfaire leur adaptation à l’environnement.
Une dernière approche motivationnelle des émotions s’est attachée à tenter de conceptualiser le côté versatile de l’émotion.

Pour la théorie de l’« antagonisme motivationnel » de Solomon & Corbit (1974), les émotions fonctionnent sur deux phases temporelles distinctes et directement inverses. Ces deux phases auraient des propriétés différentes ce qui explique le côté changeant de l’émotion. C’est un raisonnement similaire que tient Apter (2007) pour qui les dimensions psychologiques qui sous-tendent le comportement humain sont basées sur des pairs antagonistes susceptibles d’un revirement qu’il explicite dans son cadre théorique.

Représentation intégrée de l’émotion