Le principe de la décision, bien que rarement explicité dans les modèles motivationnels, semble être basé sur une évaluation de coûts et de bénéfices qui peuvent prendre de multiples formes. C’est, par exemple, sur cette base que repose pour certains auteurs l’altruisme (Piliavin & al., 1981) ou les décisions d’achat (Taylor, 1974). Cette évaluation peut être appréhendée comme un calcul, ce qui suppose que l’homme soit un être rationnel. L’enjeu dans ce cas est de comprendre cette rationalité, ce qui revient à découvrir les règles sur lesquelles s’appuie le raisonnement humain.
Une avancée majeure a été effectuée par Bernoulli (1738/1971) dans le domaine des comportements à risque portant sur des paris, quand il a démontré que le raisonnement du joueur ne reposait pas sur l’espérance mathématique. En effet, l’individu a tendance à se montrer moins gourmand que ce que prédit l’espérance mathématique. Bernoulli (1738/1971) a donc eu l’idée d’introduire une nuance entre deux formes de valeurs. « La détermination de la valeur d’un article ne sera pas fondée sur son prix, mais sur l’utilité qu’il procure. Le prix d’un article ne dépend que de l’objet lui-même ; il est le même pour toute personne ; en revanche l’utilité dépend des conditions particulières où se trouve la personne qui a la charge de l’évaluation. Ainsi, il n’est pas douteux que le gain de mille ducats soit plus important pour un homme pauvre que pour un riche, bien que le montant soit le même pour l’un et pour l’autre. » (Bernoulli, 1738/1971, p. 6). Cette nuance subtile entre deux formes de valeur permettra à Bernoulli (1738/1971) de proposer un raisonnement purement mathématique qui servira de base aux théories décisionnelles en économie jusqu’au XXe siècle.

Cependant, ce raisonnement repose entièrement sur le présupposé que l’homme est un être rationnel. Différentes expériences en économie expérimentale montrent actuellement les limites d’un tel raisonnement.
La confrontation des modélisations mathématiques et des faits expérimentaux indique de façon indubitable que l’homme n’est pas d’une cohérence à toute épreuve. Dans l’expérience de McNeil & al. (1982, cité par Tversky & Kahneman, 1986) par exemple, si un problème médical est présenté en termes de chance de survie ou de taux de mortalité, le choix d’un traitement médical change alors que les proportions de survie et de mortalité restent les mêmes dans les deux énoncés. De plus, McNeil & al. (1982) ont testé ces problèmes auprès de physiciens et d’étudiants spécialisés en statistiques économiques et obtiennent les mêmes distorsions.

L’ensemble de ces considérations permet donc d’affirmer que l’étape des coûts et bénéfices, qui reste cependant la référence en matière de prise de décision, n’est pas une simple formalité d’un point de vue psychologique. Autrement dit, la détermination de la motivation la plus forte ne conduit pas toujours l’individu à faire le choix qu’on est en droit d’attendre de lui. Certains mécanismes psychologiques spécifiques à la décision doivent être pris en compte. C’est exactement ce qui se passe dans la procrastination (Ellis & Knaus, 1977 ; Knaus, 2000). Seule une explicitation des mécanismes psychologiques permet de comprendre pourquoi un individu retarde indéfiniment sa décision alors que tout l’incite à en prendre une.

À l’inverse, ce sont aussi des facteurs psychologiques qui vont permettre de comprendre comment la faciliter. Gollwitzer (1999 ; Gollwitzer & Sheera, 2006) propose à cette fin un modèle qui explique comment il est possible d’aider la prise de décision en implémentant des intentions.
Pour lui, lorsque l’individu choisit de poursuivre un objectif il n’est pas certain pour autant d’atteindre le résultat qu’il souhaite. Pour cela, il doit franchir différentes étapes qui nécessitent la prise en compte d’éléments complexes. En fonction de la situation, il doit déterminer le comportement le plus approprié et aussi « quand » et « comment » il doit adopter ce comportement pour atteindre l’objectif qu’il s’est fixé. Dans de très nombreux cas, même si l’individu est très motivé pour agir, il n’est pas pour autant en mesure de savoir précisément quel comportement adopter et à quel moment, ce qui peut bloquer ou retarder sa prise de décision au moment opportun.

Gollwitzer & Brandstatter (1997) montrent expérimentalement qu’il est possible de favoriser le comportement d’étudiants motivés en créant une implémentation de l’intention avec la structure suivante : « Quand la situation x se produit, je vais réaliser la réponse y ». L’implémentation d’intentions permet d’anticiper les opportunités et donne lieu à une orientation des réponses de l’individu. En formulant de telles intentions, l’individu s’engage à répondre à certaines situations de telle manière.

Représentation intégrée de la décision