De très nombreuses théories font de l’estime de soi un centre nodal d’où rayonne une motivation humaine aux déclinaisons surprenantes, ce qui leur permet, dans certains cas, de porter des regards originaux sur les « productions » psychologiques.

Une première approche se caractérise par une conception utilitariste de l’estime de soi. Deux théories s’accordent sur ce point mais chacune estimant que son interprétation est meilleure que celle de l’autre. Pour Pyszczynski & al. (1997), l’estime de soi est une zone-tampon dédiée à la gestion de l’anxiété (self-esteem buffers anxiety) générée par la perspective de la mort. Cette zone-tampon serait une structure psychologique dont la fonction est d’offrir une protection contre la terreur existentielle liée à la redoutable connaissance qu’ont les êtres humains sur l’inéluctabilité de leur fin prochaine.

Pour Leary & al. (1995, 1998, 2000, 2003), dans le cadre de la théorie sociométrique (sociometer theory), l’estime de soi, est considérée comme une jauge. Pour eux elle a une fonction sociométrique qui permet à l’individu de savoir où il en est de ses relations interpersonnelles. L’estime que l’individu a de lui-même est un index subjectif qui lui indique en permanence son degré d’inclusion ou d’exclusion auprès d’autrui. L’individu serait donc, en fonction du niveau interne de cette jauge, en permanence motivé pour maintenir un certain degré d’estime de soi, qui lui permette d’éviter d’être rejeté socialement ou pour augmenter son seuil d’acceptabilité sociale.
Une autre approche s’est interrogée principalement sur l’aspect évaluatif inhérent à tout jugement de soi-même.

Pour la théorie de Nicholls (1984), dans les situations scolaires, l’estime de soi est liée à la perception de compétence et le jugement de cette dernière est une fonction directe ou inverse de l’effort en fonction de deux orientations évaluatives. Dans les situations où l’individu est impliqué par l’ego, ce dernier met en place une conception différenciée qui le conduit à estimer que, moins il fait d’effort, plus il est compétent et, donc, plus l’estime qu’il a de lui-même est importante. Par contre, si l’individu est impliqué uniquement pour la réalisation de l’activité en elle-même, la perception de compétence est une fonction directe de l’effort investi.

Les théories du pessimisme défensif (Norem & Cantor, 1986a, 1986b), celle de l’auto-handicap (Jones & Berglas, 1978) ou encore de la procrastination (Ellis & Knaus, 1977 ; Knaus, 2000) se sont plus particulièrement penchées sur la gestion de l’anxiété liée à l’émergence d’une potentielle évaluation négative susceptible d’impacter l’estime de soi.
Pour ces théories, l’individu va mettre en place des stratégies relativement sophistiquées lui permettant d’atténuer ou d’éviter l’impact dévastateur que pourrait avoir une évaluation négative sur l’estime de soi notamment quand cette dernière a lieu dans certaines conditions.
Rhodewalt & Vohs (2005) proposent à ce niveau un modèle relativement complexe qui permet d’expliquer quand, comment et pourquoi les individus ont recours à des stratégies défensives centrées sur l’estime de soi. De même, dans un modèle ambitieux, Baumeister (1997) postule que l’estime de soi (egotism) est à l’origine de nombreuses conduites d’autodestruction.

Une dernière approche s’est particulièrement intéressée aux conditions nécessaires, sans qu’elles soient pour autant suffisantes, qui doivent être présentes pour impliquer l’estime de soi.
Les modèles « attributionnels » de Weiner (2005) et de Peterson, Maier, Seligman (1993) estiment que la question du locus d’attribution est, dans cette perspective, tout à fait centrale ; surtout dans des situations susceptibles de mener à l’échec. Pour ces deux théories, si l’individu peut attribuer ses échecs ou ses réussites à des causes internes (compétence ou effort par exemple) plutôt qu’à des causes externes (chance par exemple), l’impact sur l’estime de soi peut en être totalement modifié.

Représentation intégrée de l’estime de soi